vendredi 27 septembre 2013

Cordonnier bien chaussé, médecin bien soigné

Il y a près d'un an, un type me confiait sa conviction que tout psy(-chiatre/-chanalyste/-chothérapeute) avait l'obligation morale de se  psyquelquechoser lui-même afin de traiter ses patients tout en étant libre de ses... propres trucs. Bien que cette obsession du cordonnier bien chaussé me semblait ridicule, beaucoup d'arguments la soutiennent dans le cas des relations entre médecin et patient.
Les médecins obèses évoquent moins l'obésité comme un problème de santé ou diagnostiquent moins leurs patients comme obèses. Les médecins fumeurs ont plus de patients fumeurs. Ceux aux habitudes saines motivent mieux leurs patients à changer leurs habitudes. Un médecin n'est pas nécessairement un modèle, et les patients sont plutôt autonomes (voir ceci). Néanmoins, un médecin est certainement une référence pour définir la bonne santé ou un bon comportement de santé, et la crédibilité semble être une clé pour une relation efficace entre médecin et patient. Ainsi, en plus d'avoir une pratique biaisée s'ils sous-estiment les risques de leurs propres états, l'efficacité des conseils du médecin peut en être affectée.
La pratique de la communication de la santé n'inclut pas que des communicateurs professionnels. Rien ne garantit les compétences en communication des médecins ni que ces derniers comprennent pleinement l'importance de leur image.

mardi 18 juin 2013

Retour sur la conférence sur la santé publique au Canada

En faisant un petit tour des présentations (orales et par affiche) et des kiosques d'entreprises en santé publique lors de la conférence de l'ACSP, je me suis aperçue que la conception des communications ne correspondait pas toujours à ce que j'avais appris sur les bancs d'école.
Les praticiens avaient la volonté de produire les meilleures stratégies possibles afin de servir la cause de la santé et de la population, et les chercheurs tentaient de cibler les aspects cruciaux des communications qui pouvaient affecter la santé publique. Les praticiens et chercheurs ont présenté des travaux de qualité et des évidences permettant des pratiques efficaces.
Malgré cela, certains ne voyaient des communications que le canal (i.e. par là où passe le message) ou ne pensaient qu'aux communications faites par l'entreprise destinées au public (pour employer les grands mots: communications organisationnelles externes unidirectionnelles). D'autres organismes cependant comprenaient l'interactivité des nouveaux médias et l'intégraient dans leurs pratiques globales afin de vraiment faire partie de leurs communautés et mieux les servir. Des études sur les médias et des opérations de promotion reconnaissent aussi l'indépendance des récepteurs d'information et leur liberté d'interprétation.
Néanmoins, aucun projet, que ce soit de promotion ou de recherche, ne démontrait une vision conceptuelle de la communication. J'oserais dire qu'ils étaient témoins d'une pratique générale qui manque de réflexion sur tout le sens des communications. Par exemple, dans aucune discussion que j'ai pu y avoir n'a émergé l'idée de jouer sur les représentations de la santé dans les médias de divertissement. Une vision plus globale permettrait des pratiques plus innovatrices.

J'espère pouvoir bientôt montrer un article plus approfondi grâce à ma collaboration avec mon amie C.D. Bergeron!

vendredi 26 avril 2013

Après nous avoir vendu du rêve, Coca-Cola espère qu'on n'ait plus les pieds sur terre

La nouvelle campagne internationale de Coca-Cola est sortie ces derniers jours au Canada. L'entreprise géante n'essaie plus de nous vendre du rêve, mais de la santé. Cette nouvelle campagne de sensibilisation à l'obésité semble séduire quelques citoyens... "Il ne faut pas toujours condamner les entreprises! Il faut que les gens soient responsables d'eux-mêmes. Personne ne les force à consommer ces boissons." répondent-ils approximativement aux critiques.

Les opinions individuelles sont facilement explicables par leurs sources d'information. Les nouvelles télévisées de CBC présentent clairement que Coca-Cola essaie de leurrer le public, alors que La Presse et The Globe and Mail présentent de nombreux défendeurs de la campagne sans pondérer leurs arguments par leurs provenances, et rapportent partiellement les pourfendeurs, ce qui leur donne une apparence de bornés, voire de roquets. Le Devoir et le Toronto Star quant à eux n'en parlent pas.

Si on veut commenter le contenu de l'information, on peut critiquer les médias, mais il ne faut pas négliger les sources d'information des journalistes eux-mêmes. Certains organismes citoyens, tels que ceux qui luttent contre l'obésité, ont le devoir de publier des communiqués de presse en l'occurrence. Coalition poids a accompli sa mission; son communiqué rappelle des règles de base en nutrition et les effets pervers des campagnes de promotion de la santé faites par des entreprises ayant une part de responsabilité majeure dans le problème. Les méfaits du faux marketing social sont d'ailleurs prouvés.

Malgré la pertinence du communiqué, ce dernier ne mérite pas de A+: une bonne communication prévoit la réaction du récepteur, et je ne pense pas que la réutilisation du communiqué par La Presse ait été bien prévue. Bien évidemment, si un journaliste veut discréditer un organisme comme étant "conspirationniste", il le fera, mais on peut toujours essayer de lui en donner la chance le moins possible. Ainsi, le communiqué aurait dû comporter un discours plus objectif et éviter des expressions telles que "se donner bonne conscience" ou "offensive de propagande pour s’acheter une bonne image" (bien que je pense personnellement la même chose). Les porte-parole doivent aussi suivre cette ligne puisque les propos rapportés dans l'article de la Presse laissent croire que Coalition poids nie le manque d'activité physique comme cause cruciale de l'obésité, alors que le communiqué admet justement l'importance de l'activité physique dans la gestion du poids.

Enfin, pour ce qui est des organismes qui promeuvent l'activité physique, il est compréhensible qu'ils ne critiquent pas cette campagne: Coca-Cola est leur vache à lait... Ensuite, que Diabète Québec accepte le financement de Coca-Cola est une chose (pour laquelle je n'ai pas trop de problème), mais que l'organisme soit aussi naïf face à la nouvelle campagne en est une autre:
Serge Langlois, président de Diabète Québec, n'y voit pas de contradiction. «C'est une subvention sans restrictions, a-t-il fait valoir. Coca-Cola vend aussi du jus, de l'eau. On est toujours en train de leur taper sur la tête, mais quand ils font quelque chose de bénéfique, on devrait dire bravo.» (Pris d'ici)
Le problème est justement que la publicité associée à cette opération de commandite ne présente que très peu ses eaux et ses jus. La publicité, qui se veut une amélioration de l'image de l'entreprise, ne présente même pas l'entreprise en tant que telle. Elle ne présente surtout que LE Coke: son produit classique.


Une image pour la forme: